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Festival de jazz de Montréal

Robert Plant et Alison Krauss: concert de feu et de ferveur

Robert Plant et Alison Krauss: concert de feu et de ferveur
Alison Krauss et Robert Plant. / Victo Diaz Lamich/Festival de jazz

La deuxième semaine du Festival international de jazz de Montréal a proposé des concerts en tous genres qui ont en commun d’avoir été remarquables. Survol.

Plant et Krauss : de feu et de ferveur

Si vous avez un ami irréductible de Led Zeppelin, il est probable qu’il se trouvait à la salle Wilfrid-Pelletier, vendredi, pour le retour de Robert Plant à Montréal, lui qui a mis un terme à sa carrière avec le groupe anglais lors d’un concert mythique à Londres, en 2007.

C’est également cette même année que Plant a enregistré son premier disque (Raising Sand) avec la chanteuse bluegrass Alison Krauss. Ils partageaient l’affiche au Festival de jazz, hier, moins de deux ans après la parution de leur deuxième album, Raise the Roof.

S’il y a indiscutablement des gens qui venaient pour Plant avant tout, il y en avait sûrement autant pour voir l’improbable tandem dont la première tournée n’était pas passée sur nos terres.

Alison Krauss/Victor Diaz Lamich/FIJM

Source: Alison Krauss/Victor Diaz Lamich/FIJM

La terre. Les racines. Les racines musicales d’antan, surtout. C’est ce dont Led Zeppelin s’est nourri durant sa carrière – plagiant quelques grands au passage. Or, ce sont tous les genres musicaux (country, rockabilly, bluegrass, folk) qui ont précédé la carrière du groupe britannique qui sont représentés dans la musique de l’Anglais et de l’Américaine. Pour Plant, cette aventure musicale avec Krauss a tout du retour d’ascenseur rédempteur.

Le duo, qui a opté pour des tenues noires, s'est présenté sur une scène somptueusement drapée avec leurs musiciens fringués en complets. Classe et élégance des grands soirs en dépit des propos ironiques de Plant sur le jazz au cours de la soirée.

Partage et complémentarité

Toute la soirée durant, Plant et Krauss ont partagé des chansons ou ils ont été complémentaires. Pour l’étoffée Rich Woman et la swingante I Can’t Let Go, les interprètes ont fait jeu égal. Parfois, la voix de Plant semblait un peu plus en avant-plan. Tantôt, c’était l’un ou l’autre qui prenait la direction des opérations : Plant pour Fortune Teller, Krauss pour The Price of Love, durant laquelle sa voix céleste s’est élevée vers le ciel.

Rock and Roll a suivi. Mais pas la version que des millions de gens ont entendu sur disque depuis cinq décennies, ni même celle servie à Londres dans ce qui fut la dernière chanson jamais jouée par Led Zeppelin en concert. Ça faisait tout drôle d’entendre le violon à la place de la batterie pour amorcer la chanson et ce même instrument partager les solos avec le guitariste JD McPherson qui avait donné le ton avec une première partie solo tellement rockabilly qu'elle aurait pu être entendue… en 1958. N'empêche, cette Rock and Roll trempée dans les eaux de divers États américains était une excellente indication de ce qui allait suivre.

Robert Plant/Victor Diaz Lamich

Source: Robert Plant/Victor Diaz Lamich

Parmi les chansons de Raise the Roof (2021), High and Lonesome et Trouble with My Lover ont été du tonnerre, comme si la complicité qui existait entre Plant et Krauss n’avait pas pris une ride en 14 ans. On pourrait dire la même chose sur scène. Plant a cédé le plancher à sa collègue qui a été impériale dans ses interprétations et royale avec son violon.

Plant n’a pas été chiche, rayon vieilles chansons. En comptant celles de Led Zeppelin, les siennes (In the Mood) et celle du duo Page-Plant (Please Read the Letter), c’est quand même une demi-douzaine de titres qui ont été proposés.

Le triplé de Led Zep (Gallows Pole, The Battle of Evermore, When The Levee Breaks) qui a précédé les rappels a été le point d’orgue. Interprètes et instrumentistes étaient à leur sommet durant cette séquence de relectures époustouflantes où Plant a démontré qu'il avait encore une puissance vocale étonnante.

Après cinq bonnes minutes d’ovation et une sortie de scène, tout le monde est revenu pour un retour aux racines au rappel avec un doublé des Everly Brothers. Les voix de Plant et Krauss étaient si parfaitement en harmonie pour Stick with Me Baby que ça frisait l’indécence. C’était sublime....

Victor Diaz Lamich/FIJM

Source: Victor Diaz Lamich/FIJM

Gone Gone Gone a magnifiquement mis un terme à ce concert-événement goûteux au possible qui a dépassé les attentes pourtant immenses.

La reine Diana

Avant ses deux concerts présentés à la salle Wilfrid-Pelletier cette semaine, Diana Krall s’était produite pas moins de 27 fois à Montréal depuis 1995 au Festival international de jazz de Montréal ou lors d’un concert produit par le FIJM ailleurs que durant la saison estivale.

Au cours des ans, on l’aura donc vue en solo, en trio, en quartette et avec orchestre au Cabaret Just pour Rire, au Spectrum, au Théâtre du Nouveau-Monde, au Théâtre St-Denis, à la Place des Arts (Salle Wilfrid-Pelletier, Théâtre Maisonneuve), au Théâtre du Centre Bell (produit par le groupe Gillett), au Centre Bell et sur la Place des festivals avec son mari Elvis Costello.

Pour son retour après six ans à Montréal, il n’était pas surprenant de la voir arriver sur scène, mardi soir, vêtue d’une longue robe aux reflets dorés et argentés. Le pendant féminin du complet doré d’Elvis des années 1950, finalement. La royauté.

Diana Krall et ses musiciens/Victo Diaz Lamich/FIJM

Source: Diana Krall et ses musiciens/Victo Diaz Lamich/FIJM

Pour l’occasion, elle se produisait en quartette avec Anthony Wilson, son fidèle guitariste depuis une vingtaine d’années, ainsi que le contrebassiste John Clayton junior et le batteur Jeff Hamilton.

Constat effectué lors d’une dizaine de concerts depuis 25 ans, Krall est souvent là où on ne l’attend pas. Mardi, elle est arrivée sur scène en quartette, mais elle a amorcé son concert avec une version piano-voix de Where Or When, tout en retenue, et presque narrative.

Autre évidence mesurée plus d’une fois : contrairement à une certaine perception qui avait atteint son sommet avec le disque et la chanson The Look of Love dans les années 2000, Krall n’est pas une artiste pop, mais une jazzwoman accomplie.

Son concert d’une heure et 45 minutes l’a démontré d’un bout à l’autre. La pianiste a laissé beaucoup de place à ses instrumentistes. Wilson y est allé de quelques solos chirurgicaux, lui qui semble toujours appliqué comme un étudiant quand il les offre. On sentait beaucoup plus le plaisir et l’aisance chez Clayton junior et Hamilton, qui affichaient des sourires complices.

Cela dit, la complémentarité de l’ensemble était palpable comme on l’a constaté durant All or Nothing at All, Devil May Care ou You Call It Madness, cette dernière nous ramenant à ses débuts des années 1990. La pianiste a proposé un jeu vif sur les ivoires, quoique parfois en ruptures, mais aussi farci de glissandos. Je ne l’ai jamais vue en faire autant durant un concert. Au plan vocal, son timbre est un peu plus voilé avec le temps et les interprétations se bonifiaient au fur et à mesure que le concert progressait.

Diana Krall/Victor Diaz Lamich/FIJM

Source: Diana Krall/Victor Diaz Lamich/FIJM

Krall, visiblement heureuse d’être de retour dans la ville qu’il l’a vue grandir, artistiquement parlant, a évoqué souvent de son lien avec la pluie – pas étonnant, pour quelqu’un qui est né en Colombie-Britannique – et avec la ville.

L’interprétation de Famous Blue Raincoat, de Leonard Cohen, semblait de mise. Durant près de dix minutes, Krall a interprété le classique dans une mouture épurée (piano-voix) mystérieuse au possible. À ce moment, le bout de ses doigts touchait le clavier avec une délicatesse infinie, comme pour ne pas rompre sa concentration et le silence total qui régnait alors dans la salle Wilfrid-Pelletier. L’interprète s’est gourée dans les paroles de la chanson pour aussitôt dire: «Pardon, Leonard» et de poursuivre avec la même intensité.

À l’opposé, les rappels ont été impeccables et fougueux, lorsque I’ve Got You Under My Skin et East of the Sun (and West of the Moon) sont venus conclure ce retour aux sources avec panache.

Le festin de Thundercat

Il est de ses artistes dont le nom de scène résume parfaitement leur œuvre musicale. C’est le cas de Stephen Bruner, mieux comme sous le nom de Thundercat, qui est venu mettre le feu à la Place des Festivals, mercredi soir.

Les notes du bassiste crevaient la moiteur de cette soirée vécue à 26 degrés Celsius avec une humidité de 100 %. Et pourtant, la Place des Festivals était non seulement bondée – une habitude -, mais les spectateurs étaient si nombreux que l’on croyait être à l’avant d’une scène au Festival Osheaga… même aussi loin que sur la rue Sainte-Catherine.

Thundercat/Frédérique Ménard-Aubin/FIJM

Source: Thundercat/Frédérique Ménard-Aubin/FIJM

Le genre de chose qui ne surprend guère avec un Vance Joy, disons, vedette planétaire d’une certaine pop. Mais Thundercat, disons qu’à priori, c’est moins grand public. Sauf que le virtuose américain est aussi lié musicalement à un tas de pointures influentes des dernières années, que l’on pense uniquement à Kendrick Lamar, Gorillaz et Flying Lotus.

Amateurs purs et durs et autres festivaliers ont été bombardés durant plus d’une heure et demie – le concert a pris fin à 23h05 – par des notes lourdes parfois jouées à vitesse supersonique, les claviers fiévreux de Dennis Hamm qui avait parfois l’air d’être un Keith Emerson en transe et la batterie mitraillette de Justin Brown dont le casque en forme de boule disco est l’accessoire le plus cool vu cette année au FIJM.

Justin Brown/Frédérique Ménard-Aubin/FIJM

Source: Justin Brown/Frédérique Ménard-Aubin/FIJM

Thundercat a joué des chansons de son plus récent disque It Is What It Is ainsi que des titres créés au cours des ans avec d’autres artistes, comme Flying Lotus (Black Gold). Son pote Louis Cole est venu le rejoindre pour I Love Louis Cole, chanson née de leur amitié quand Thundercat était un peu… perdu, disons, à la lumière de ce qu’il a raconté aux festivaliers.

Tron Song était explosive à souhait et Them Changes a été un point culminant, avant le rappel. Une grosse suée musicale fusionnant des tas de genres - incluant le free jazz – sous les étoiles. Magique.

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